Karine Chossinand, créatrice de KCMC, Coach personnel et professionnel RNCP spécialisée en cancérologie et maladies chroniques
Pourquoi se lancer dans un coaching personnalisé alors qu’on est confronté à un cancer ? Quels sont les bénéfices du coaching ?
Les personnes qui viennent me voir ont plusieurs profils. Soit, elles ont envie de changer mais ne savent pas comment, car la maladie a changé leurs priorités et leurs vies. Soit, elles savent comment changer mais expriment des freins, qui les empêchent d’avancer. D’autres, souffrent de leur situation et sont un peu perdues après la prise en charge qui a été soutenue à l’hôpital et sont un peu démunies devant la baisse de la régularité des accompagnements en comparaison dans « l’après ». (Alors qu’il y en a beaucoup). Certaines encore ont besoin de trouver ou de retrouver qui elles sont.
Comment se déroule généralement un programme de coaching avec toi ? À quoi les patient.e.s peuvent-ils s’attendre ou comment peuvent-ils se préparer ?
Un coaching avec moi se passe très bien ! 🙂 Nous échangeons en premier lieu pour savoir ce que le ou la coaché.e souhaite changer ou faire évoluer dans sa vie. Puis, nous établissons une convention de coaching. C’est l’une des grandes différences avec des séances de psychologie.
En coaching, nous commençons et terminons un travail commun dans une période de temps définie par la convention. Durant cette période de temps, l’objectif doit être réalisé en totalité ou en très grande partie s’il y a eu des contre-temps. En psychologie, on peut commencer un travail sans vraiment savoir quand il se terminera ou le faire par période de besoin. Le coaching est tourné vers le présent et l’avenir.
La convention cadre le nombre de séances, la fréquence, l’objectif à réaliser et le prix. Lors de mes coachings, les personnes peuvent s’attendre à un cadre spécialisé, challengeant, motivant, rassurant, sans jugement, à l’écoute, humoristique (car j’aime beaucoup rire) et surtout elles vont évoluer en mieux et le constater assez rapidement.
Peux-t-on faire appel à toi à n’importe quel moment de son histoire avec la maladie ?
Oui et non. En général cela va dépendre du traitement, de l’énergie de la personne et de l’objectif. Si la personne me propose un objectif très challengeant alors que son énergie n’est pas au rendez-vous, je vais l’alerter et lui proposer de décaler dans le temps le projet à un moment plus raisonnable pour sa santé ou de baisser l’intensité de ses objectifs.
Si l’énergie est là, l’objectif raisonnable et si le traitement le permet alors oui on peut me solliciter à plusieurs moments clés de la maladie.
En général, on me contacte lorsque l’on se sent prêt.e et cela varie entre la fin des traitements (la radiothérapie ou l’hormonothérapie par exemple) et l’après cancer.
Une de mes coachées m’a contactée plus de 10 ans après son cancer car elle était toujours coincée avec sa problématique personnelle. La bonne période est donc variable selon les personnes. Le meilleur moment se situe quand on exprime un besoin qui est le nôtre.
Est-ce que l’on peut pratiquer tes coachings en famille ? Avec son ou ses enfants ? Avec sa/son conjoint.e ?
Oui. Lorsque la maladie arrive, elle crée parfois des tensions, des non-dits, des incompréhensions et des décalages. Il m’arrive de faire du coaching de couple, du coaching pour les enfants ou les parents en fonction des demandes. Le coaching s’effectue en individuel ou en groupe, tout dépend de la problématique.
Ce que je pratique beaucoup est le coaching professionnel pour réaligner les valeurs et trouver son job de rêve après la maladie et du coaching d’émotions et de vie. Je pratique mensuellement des bilans de compétences spécialisés, qui sont individuels car personnalisés.
Tu as beaucoup d’expérience dans « l’après-cancer », pourquoi cette période est-elle particulièrement délicate pour les patient.e.s ?
J’ai accompagné quelques milliers de personnes en tant que soignante. Je me suis aperçue lors des contrôles à 3 puis 6 mois, puis, annuelle que les patient.e.s sont souvent en décalage avec leur entourage et sont déphasées entre le moment des traitements très suivi et rythmé par les rendez-vous et l’après, où plus personne ne vous suit vraiment ou très régulièrement. C’est pour les aider que j’ai souhaité créer un coaching spécialisé. Les anciens patients y sont sensibles pour réorganiser leur vie et déterminer un nouveau cap ou le réajuster.
Pourquoi selon toi l’expérience de la maladie entraîne-t-elle des reconversions professionnelles ou remises en question de son travail ? Est-ce un problème lors du retour au travail ? Une quête de sens générée par une expérience traumatique à bien des égards ?
Les reconversions professionnelles sont bel et bien présentes mais ne sont pas la règle. Le travail est un lieu où l’on peut s’exprimer et aussi où l’on doit respecter certaines règles de fonctionnement propres à l’entreprise. Il n’est pas rare que le cancer remette certaines valeurs ou priorités personnelles au devant de la scène et que celles-ci soient comparées à celle de l’entreprise.
Il y a bien une quête de sens à plusieurs niveaux dans laquelle nous cheminons avec la/le coaché.e. Mais il arrive que les réponses soient trouvées et qu’elles n’induisent pas de reconversion, ni de démission. Dans ce cas, le rapport avec le travail sera renforcé. Il est intéressant, à mon sens, de trouver ses réponses pour ne pas errer, se perdre en chemin ni risquer l’épuisement ou le burn out après cancer.
Au-delà du coaching personnalisé que tu peux proposer, quels sont les soins de supports qui te semblent les plus importants pour se sentir mieux dans son combat face au cancer ?
Au-delà du coaching que je propose, les soins de support qui me semblent importants sont :
– les sports que ce soit pour le bien-être, la rééducation, la convivialité ou le challenge,
– tout ce qui est de l’ordre du bien être ou des soins non médicamenteux : l’alimentation, les massages, la valorisation de soi ou de l’expression de soi.
Je suis particulièrement fan des produits MÊME car je trouve qu’ils ont une dimension multiple, à mi-chemin entre le soin et la reconquête de soi. Travailler son image et de surcroît en tant que femme, faire le choix, voir le choix et être en maîtrise de ce que l’on veut montrer dans ce parcours me semble très important. Cerise sur le gâteau : c’est le plus naturel possible et ça sent vraiment bon. Un grand bravo pour tout ce que vous faites !
Peux-tu nous parler d’une rencontre / expérience qui t’a particulièrement marquée au cours de tes coachings ?
Oui, j’ai en tête deux parmi de nombreuses :
La première, était avec une dame de 45 ans célibataire et particulièrement endettée. Vivant seule, personne chez elle n’avait relevé les factures, ni averti de son hospitalisation. Elle a donc accumulé les dettes, malgré elle, durant sa convalescence. De retour d’hospitalisation un cancer plus tard, elle est venue me voir littéralement en pleurs et m’a dit qu’elle ne voyait pas comment s’en sortir. Elle détestait son métier. Elle était seule. Elle n’a jamais réussi à me dire à combien était son compte en banque tellement elle souffrait à la vue du nombre (négatif). Ça nous a pris 5 mois. Elle s’est reconvertie, a créé son entreprise, elle a remis le pied à l’étrier et a déménagé. Aujourd’hui, elle vit de son activité.
La seconde était avec un monsieur de 52 ans qui souffrait d’exercer un métier très loin de ses passions. Il travaillait dans le secteur alimentaire et était passionné de sport. Cela lui a pris 4 mois : enseigner le sport qu’il préférait, le tennis. Il est à présent motivé et heureux de se lever le matin.
En vérité, chaque histoire de vie que je partage me marque car j’aime voir les gens trouver leur voie et réussir à y accéder. C’est une grande fierté pour moi.
Quels conseils pourrais-tu donner à quelqu’un qui fait actuellement face à un cancer ? Et aux proches ? (afin de mieux appréhender le quotidien avec la maladie)
Chaque vécu par rapport au cancer est singulier. Si je devais proposer quelque chose ici ce serait :
– de s’accepter dans nos faiblesses/émotions,
– de s’organiser pour gérer le quotidien le plus vite possible pour arriver à une routine stable et sécurisante,
– de s’engager un jour après l’autre avec humilité car c’est un marathon et que chaque jour à son pesant de chose à faire ou à vivre,
– enfin de prendre soin d’eux, de leurs proches, de renforcer les liens qui leur semble porteurs et constructifs pour eux.
Je leur adresse tous mes vœux de rétablissement 🙂